RAPPORT MORAL 2015 AIV BERLIN

Pour écrire ce rapport, j’avais réservé un dimanche après-midi ensoleillé.

Les tristes événements de Paris, que vous connaissez, se sont déroulés entre-temps.

Ils ont bien entendu perturbé ma réflexion sur les vins nobles.

Que vous dire après cette tragédie, et quelle attitude pouvons-nous adopter en tant qu’ « homme du vin », devant une telle situation, face à de telles extrémités ?

L’Académie peut-elle apporter un message capable d’apaiser la haine, de diminuer l’aveuglement ?

Pensons aux causes de ces violences.

Je ne vous parlerai pas ici de politique, de religion, d’économie ou de corruption, là n’est pas mon propos ni mon rôle.

Je pense à d’autres causes sur lesquelles nous pouvons agir, être utile par notre métier :

-La déculturation alimentaire, abandonnée aux grands groupes qui standardisent les produits

-La publicité, qui vend du superflu

-La grande distribution qui asservit les producteurs

-L’exploitation exagérée des sols : engrais chimiques, pesticides

-Une éducation sensorielle oubliée, délaissée par les parents et par l’école

-Des lois qui encouragent certains à boire jusqu’à rouler sous la table, tout en stigmatisant les produits naturels.

Si nous sommes réunis ici, à Berlin, chers collègues Académiciens, c’est pour apprendre, échanger, se cultiver, mais aussi pour réfléchir au respect du vivant, à l’esprit de l’Académie qui, par des actes

exemplaires, doit être capable de rendre les vins nobles encore plus nobles.

Je pense particulièrement à :

-Etre au service de son terroir et non pas l’exploiter

-Respecter son domaine, le faire fructifier dans le respect de sa pérennité, car cette terre nous est prêtée et non donnée

-Défendre sa culture alimentaire, les produits simples et naturels

-Encourager l’éducation du goût, un enjeu de civilisation de premier plan

-Enseigner la dégustation des vins subtils, personnalisés, qui demandent attention, concentration, respect

-Minimiser la technique, au profit du savoir faire ancestral

-Favoriser l’installation de jeunes viticulteurs, afin de leur donner des raisons de croire en l’avenir : HUMUS, HUMILITE, HUMANITE

-Favoriser le local, bien sûr, mais accepter les échanges plus lointains qui permettent la découverte de vins authentiques et de grande personnalité

-Et, surtout, combattre les vins standards, sans défaut, mais hélas sans grâce.

Ayons toujours dans la tête et dans le coeur cette recherche incessante du goût, du vin qui se garde et se magnifie avec le temps, le mariage du subtil et de la patience.

Ainsi pourrons-nous dire avec fierté : BOIS CE VIN ET SOIS BON COMME LUI.

Merci de votre attention.

Raymond Paccot

Chancelier

 

 

Rapport moral RP 2015