L’AOC, c’est la fusion entre un terroir (sol, climat), une ou plusieurs variétés végétales et une tradition, un savoir-faire de l’homme. Cette fusion des éléments aura pour résultat de conférer à un produit agro-alimentaire des caractéristiques organoleptiques non reproductibles ailleurs puisque tous les éléments ne seraient pas transposables sur un autre site. C’est ce que l’on appelle la TYPICITE, reconnue par les consommateurs. A condition que le terroir (sol + climat) ait des caractéristiques propres, que l’interaction entre les variétés végétales et le terroir soit forte et que la tradition et les usages soient respectés par l’homme. L’homme est au service du terroir. Son rôle est de mettre en lumière ses caractéristiques intrinsèques. Tout acte déformant cette authentique particularité serait contraire à l’esprit de l’AOC.

LE SYNDICAT DE DEFENSE DE L’AOC

Sa mission est de préserver dans son intégrité l’expression du terroir à travers sa définition (délimitation), et les caractéristiques du produit dont il est issu (conditions de production),  donc de défendre l’AOC en tant que telle. La mission du Syndicat d’AOC est donc intrinsèquement et essentiellement de demander cette délimitation et proposer les conditions de production à inscrire dans le décret et veiller au respect du décret une fois publié par l’ensemble des producteurs. Ce travail se fera en lien naturel avec l’INAO, lieu de rassemblement de professionnels nommés.

L’INAO exerce la tutelle des Syndicats d’AOC, ce qui a été voulu par le législateur en 1935 pour s’assurer que les souhaits exprimés ne soient pas contraires à la mission de préserver l’intégrité, l’authenticité et l’originalité de l’AOC. En particulier, l’INAO ne peut pas donner suite à des propositions motivées par un intérêt à court terme à caractère standardisant, industrialisant ou banalisant qui mettraient inévitablement en danger l’intérêt à long terme. La gestion d’un patrimoine est sous-tendue par l’intérêt de préserver dans le long terme ce que les professionnels ont reçu et ce qu’ils devront rendre dans le même état. C’est donc une mission de gardien du patrimoine qui est dévolue aux Syndicats d’AOC. Notion que l’on peut reprendre dans la formule lapidaire « Nous devons préserver la terre que nous empruntons à nos enfants ». A chaque AOC devrait donc correspondre logiquement un Syndicat de défense de l’AOC spécifique.

L’INAO – Définition

Etant un établissement public à caractère administratif, le législateur a voulu que l’AOC, élément essentiel du patrimoine national, soit géré au nom du gouvernement (dont c’est la charge) par les Syndicats d’AOC sous tutelle de l’INAO. Pour ce faire, le Ministère de l’Agriculture délègue au nom du Gouvernement son pouvoir à l’INAO, composé de professionnels nommés par lui (et non élus par leurs pairs, ce qui rendrait impossible dans ce cas la délégation de la puissance publique par le Ministre, seul habilité à le faire). L’INAO a donc par cette construction juridique la capacité à légiférer par voie de décret. Le texte de droit public s’impose par nature à tout producteur; la puissance publique peut être utilisée s’il n’était pas respecté. Les membres de l’INAO de par leur statut sont INDEPENDANTS puisque nommés par décret pour 6 ans. Dans le champ de compétence qui est uniquement la gestion d’AOC en tant que telle, ils établissent des textes horizontaux pour les questions à caractère général, et des textes spécifiques sur demande du Syndicat d’AOC concerné pour les questions à caractère particulier.

Les professionnels sont seuls au sein du CNINAO à avoir le pouvoir de décision pour valider les orientations dans le champ spécifique de l’AOC.

Rôle :

– Exercer sa tutelle, sa mission étant de s’assurer de la bonne gestion des AOC par les Syndicats d’AOC.

– Etablir les décrets d’AOC: c’est à dire transformer en texte de droit public les conditions de production souhaitées par les Syndicats après validation par le CNINAO.

– Adapter la doctrine en la préservant par les textes horizontaux pour répondre à l’évolution, pour corriger les déviances, pour combler les vides.

Composition :

– Professionnels: 55 personnes issues de la viticulture et du négoce choisies dans les 13 Comités Régionaux.

– Personnalités qualifiées: 18 personnes choisies pour leur compétence particulière.

– Administrations: 10 représentants Agriculture, Concurrence et Répression des Fraudes, Douanes.

Les professionnels siègent intuitu personnae. C’est à dire que leur mission est de participer à l’accomplissement des missions de l’INAO indépendamment de leur région d’origine et de leur famille professionnelle.

LA NATURE JURIDIQUE DE L’AOC

L’AOC relève du droit public. La terre, la vigne, le vin appartiennent aux vignerons (droit privé). L’AOC est un élément du patrimoine national, donc de droit public. C’est à dire une propriété de la Nation gérée par le Gouvernement au nom de l’Etat français. Pour ce faire, la législation de 1935 a voulu déléguer cette gestion et cette préservation de du patrimoine national à ceux qui avaient la connaissance et le savoir-faire: les vignerons eux-mêmes, réunis en Syndicats d’AOC. Le Syndicat de l’AOC soumet les conditions de production définies au sein de leurs assemblées générales à l’INAO, tutelle légale des Syndicats d’AOC (compétence liée avec le Ministère de l’Agriculture). L’INAO aura le pouvoir de transformer les souhaits du Syndicat d’AOC après validation par le Comité National (CNINAO), en DECRET D’AOC,  qui par sa nature de droit public transformera une volonté collective de droit privé en texte de droit public s’imposant à tous et opposable aux tiers. Le décret confère à l’AOC la garantie de l’Etat et la puissance des pouvoirs publics pour veiller à son respect.

LE DECRET D’AOC

Il comprend fondamentalement :

– La délimitation

– Les conditions de production

LA DELIMITATION

Faite sur demande des professionnels, elle est établie par des experts indépendants des professionnels, nommés par l’INAO, qui aura pour mission de trancher en cas de conflits.

LES CONDITIONS DE PRODUCTION

Proposées par les professionnels, elles seront examinées par une commission d’enquête issue de L’INAO, qui aura pour mission d’instruire et d’éclairer le Comité National sur la décision à prendre, si besoin en les modifiant, avant de les inscrire dans le décret. Les professionnels doivent être attentifs à la qualité de la rédaction du décret. C’est en effet la justesse des conditions de production, voulues en assemblée générale du Syndicat d’AOC, inscrites dans le décret, qui sera la seule arme, mais une arme absolue, pour contraindre tous les producteurs à respecter les conditions de production. Si celui-ci est mal rédigé pour garantir la préservation de la typicité, on ne s’étonnera pas d’assister à des dérives incontrôlables. Il est par ailleurs du rôle et de la mission du Syndicat, en synergie naturelle avec L’INAO de faire respecter le décret par tous les producteurs.

Le décret est donc la clé de voûte de la bonne gestion de l’AOC. Il permet d’atteindre trois objectifs :

– Garantir l’origine, c’est à dire ce qui fait que le vin est bien caractéristique de son terroir, affirmant en cela sa différence, son identité (s’assurer entre autre de toute dérive de rendement entraînant une dilution de l’expression du terroir).

– Garantir la qualité. Si l’origine est la cause de l’AOC, la conséquence du bon respect des conditions de production (à condition que celles-ci soient suffisamment précises), c’est la qualité (en s’assurant notamment d’intégrer une technologie dont il est avéré qu’elle renforce l’expression du terroir, qu’elle ne soit surtout pas banalisante par rapport à cet objectif). En effet, l’origine et la qualité sont chacune une condition nécessaire et non suffisante. Réunies, elles forment des conditions nécessaires et suffisantes pour une AOC parfaite. Un vin d’origine sans qualité n’est pas une AOC (au sens où le consommateur l’entend). Un vin de qualité sans caractéristiques, sans lien avec son origine n’est pas une AOC.

– Par ailleurs, garantir l’environnement Origine et la qualité ne peuvent perdurer que si, en toile de fond, il n’y a pas les conditions liées à la protection du terroir et de l’environnement. Une AOC ne peut s’épanouir dans un environnement indigne, si l’on tolère des pratiques culturales contraires à la préservation et à l’avenir du terroir.

LA RECONNAISSANCE DE L’AOC

Un terroir sans Homme n’existe pas. La première condition est qu’un groupe d’hommes identifie un terroir, ajuste la variété végétale en s’accordant sur les conditions de production nécessaires à une mise en lumière optimale de cette expression organoleptique liée à ce terroir. Les années passant, plus la pertinence de l’approche aura été juste, plus vite la notoriété se fera par les consommateurs qui demanderont cette production plutôt que n’importe quelle autre, indépendamment de sa valeur, simplement parce qu’ils retrouveront dans le produit une spécificité inexistante ailleurs. Cette notoriété établie, les risques de concurrence déloyale se feront de plus en plus pressants, d’où la nécessité pour l’INAO de

CONSACRER CETTE NOTORIETE par la reconnaissance en AOC, avec deux effets immédiats :

– Protection du producteur contre la déloyauté du marché grâce au décret.

– Protection du consommateur en lui garantissant une origine et une qualité. On comprend donc que créer une AOC sans notoriété est voué à un résultat neutre, et que les demandes doivent être étudiées avec soin pour conforter une position.

L’IMPACT DE L’AOC

En cas de bonne adéquation de cette démarche, les résultats seront de cinq ordres. Positionnement de complémentarité sur le marché et non de concurrence puisque différence du fait de la typicité (les producteurs restent acteurs de la définition du prix). Création de la valeur ajoutée irrationnelle par rapport au prix de revient, puisque l’offre étant limitée par la délimitation et les conditions de production, si la demande est croissante par la notoriété, la seule issue est une hausse des prix. Cette notoriété contribue au rayonnement de l’image de la France par l’exportation (45 milliards de francs par an, ou l’équivalent de 600 rames de TGV ou 125 Airbus) avec un coût nul ou presque pour le contribuable. 80.000 exploitations qui vivent de leur production et qui gardent un pouvoir de décision, même sur de petites superficies.

C’est également la protection de la nature par la nécessité de préserver l’environnement pour préserver le terroir. C’est enfin une contribution significative à l’aménagement du territoire par le maintien d’une agriculture et donc d’une population dans des lieux défavorisés ou arides qui seraient ou auraient été abandonnés sans la valeur ajoutée que procure l’AOC, laquelle par définition ne peut prendre son sens qu’à cet endroit précis. C’est en dernier lieu, au-delà du vin-plaisir, l’expression de dimensions culturelle, sociologique, historique, géographique, géologique, pédologique. L’AOC, c’est l’âme d’un terroir et l’esprit d’une région.