En vous présentant cet article, je suis reconnaissant à Josh Jensen pour la relecture et la traduction qu’il en a faite, et je remercie l’Académie pour avoir permis d’utiliser, en mon absence, une méthode de présentation inédite. Pour éviter que l’on suppose que c’est encore une autre discussion sur le changement climatique, je me suis efforcé de choisir avec soin la formulation du titre. Cependant, je me dois de clarifier ma position sur ce sujet que j’étudie depuis 1992. Année après année, mois après mois, semaine après semaine et maintenant jour après jour, le monde est pris dans un tourbillon d’idées reçues soutenant l’idée d’un réchauffement climatique dû à l’homme, pour la plus grande part sinon complètement, du fait des émissions de CO2 provenant des combustibles fossiles.

Les politiciens, toujours prêts à courtiser l’opinion publique telle qu’elle transparaît à travers la presse, les blogs, YouTube et autres média de masse, sont embarqués dans une tentative futile et extrêmement coûteuse de décrocher la Lune. Plus je lis et plus j’écoute, plus je suis certain que tout ce qui est admis sur le captage de carbone, les crédits carbone, et les mesures d’émission de CO2 associées est faussé (ou biaisé). Le changement climatique et l’extinction des espèces sont en ce qui nous concerne, comme ils l’ont toujours été au cours des âges géologiques : c’est le comble de l’arrogance de penser que nous, humains, pouvons arrêter le déroulement de ce changement, et ainsi préserver le climat de 1990 comme une sorte de Nombre d’or (Pour une discussion plus approfondie: www.climatedebatedaily.com).

Réchauffement et refroidissement de la Terre se sont répétés au cours du temps, le temps étant mesuré en décennies, en siècles, en millénaires, ou millions d’années. La température moyenne du globe de nos jours est plus basse que la période chaude du Moyen Age. Mais elle n’a augmenté que de 0.5°C durant les trois siècles suivant le ‘petit âge glaciaire’ aux alentours des 16 ième et 17 ième siècles, la période la plus froide des 3000 dernières années. Ce réchauffement était clairement dû à des causes naturelles et il est montré précisément par le retrait des glaciers (mesures faites sur 169 glaciers durant la période 1700 à 2000 après J.C.), retrait qui a commencé vers 1820 et a continué sans faiblir avant et après l’utilisation des hydrocarbures durant la seconde moitié du 20eme siècle. Cependant, ces changements sont minimes comparés aux changements de température des 16 000 dernières années. Entre -16 000 et -10 000 ans, durant la jeune période du Dryas, la Terre s’est réchauffée erratiquement mais significativement (de 9°C). Cependant, depuis le début de l’Holocène il y a 10 000 ans, la tendance à long terme du refroidissement, bien que douce, est remarquablement constante.

Finalement, en ce qui concerne la température, la dernière augmentation majeure durant les 100 dernières années s’est produite entre 1910 et 1940, avec une deuxième période entre 1975 et 1995. Depuis 1995, la Terre s’est refroidie entre 0.1°C et 0.01°C par an, ce qui contredit le modèle du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, en anglais IPCC) qui prédit une augmentation de température sur cette période. En ce qui concerne plus spécifiquement le rôle du CO2 : entre -444 et -353 millions d’années, correspondant à une période glaciaire prolongée, le CO2 atmosphérique était 17 fois plus concentré que de nos jours. De plus, cette concentration s’élevait à 1500 ppm il y a 60 millions d’années. En termes plus simples, la Terre est actuellement dans un environnement appauvri en CO2, et il n’y aucun lien causal entre une augmentation des émissions de CO2 et le réchauffement. Les plus récentes analyses de carottes de glace montrent que le réchauffement au cours du millénaire a précédé une augmentation en CO2 pendant 800 ans. La raison ? Les océans absorbent 50% de toutes les émissions de CO2, mais le font d’autant plus rapidement qu’ils sont dans une phase de refroidissement. Lorsqu’ils se réchauffent, ils commencent à libérer plus de CO2 qu’ils n’en absorbent.

L’activité solaire fournit une bien meilleure explication du réchauffement. La croissance de la population mondiale de 1.5 à 6 milliards au cours du 20ième siècle a sûrement joué un rôle, avec d’énormes agrégations de population dans les mégapoles de par le monde. Même si toute l’énergie basée sur le CO2 était réduite à zéro, ces villes génèreraient toujours des quantités massives de chaleur. Il n’y a aucun doute que les taux de CO2 atmosphérique s’élèvent, et que cela soit la cause du réchauffement n’est pas important en soi. Ce gaz (récemment classifié comme polluant par la Cour Suprême des USA lors d’une décision très discutée) est essentiel pour la croissance des plantes, au même titre que l’eau et l’oxygène. Quand le CO2 atmosphérique augmente, la croissance des plantes augmente. De plus, les feuilles transpirent moins et ainsi perdent moins d’eau lorsque le CO2 s’élève. Les mesures de croissance des anneaux des pins entre 1000 et 2000 ans ont brusquement augmenté durant la deuxième moitié du 20 ième siècle. Durant la même période, le Département de l’Agriculture des Etats-Unis a déclaré une augmentation de 40% des inventaires de bois  toujours sur pied.

Le très connu chercheur Australien Dr John Gladstones (Viticulture and Environment, Winetitles, Adelaide 1997) montre (p277 et plus) que la photosynthèse et la croissance de plantes bien fertilisées et irriguées peuvent être limitées par au moins l’un des trois principaux éléments environnementaux suivants : la température, la lumière et la concentration de dioxyde de carbone atmosphérique. N’importe lequel peut être le facteur le plus limitant, sinon le seul. Il y a une série d’équilibres compliqués entre ces trois éléments. Une température de maturation trop basse fera pencher la balance vers la simple accumulation des sucres dans les baies plutôt que vers la maturation physiologique et aromatique. Il en résulte une réduction des aromes et de la couleur dans des raisins à potentiel alcoolique similaire. Dr. Gladstones continue ensuite ses recherches sur les effets que peuvent avoir des concentrations de CO2 et des températures en augmentation.

Plus de CO2 entraîne une plus grande production et accumulation de sucres dans la vigne et les baies. C’est bénéfique à la qualité du fruit et des arômes, car cela augmente le flux de sucre vers les baies, et ainsi augmente la disponibilité des substrats de sucres dans les peaux. Mais il ne peut pas contribuer proportionnellement à la couleur, au goût et aux arômes si des basses températures limitent la maturation des saveurs. Il va de soi que la maturation aromatique et la qualité du raisin ne répondront pleinement à l’augmentation du CO2 que si les températures sont assez élevées. En plus de cela, avec plus de CO2 on peut anticiper une augmentation de température à laquelle les sucres restent en surplus, et ce quel que soit l’ensoleillement du feuillage. En retour, cela peut permettre une  plus grande activité enzymatique qu’il n’était possible au précédent optimum de température, surtout quand ce dernier était diminué par un ensoleillement insuffisant du feuillage. Une augmentation du CO2 n’élèverait pas seulement la limite d’optimum de température, mais elle pourrait aussi produire de bien plus grandes intensités d’arômes et de couleurs.

Ce scénario n’est manifestement pas du tout intuitif et les possibles conséquences encore moins. Il y a déjà des preuves qui suggèrent qu’une plus grande concentration en CO2 atmosphérique peut directement améliorer la résistance des vignes aux blessures dues aux hautes températures pendant la croissance végétative. Ceci devrait bénéficier à la qualité du fruit, bien évidemment avec moins d’effeuillage lors des coups de chaleur et des stress hydriques, et partiellement à travers d’autres mécanismes. La conséquence finale est que l’augmentation du CO2 atmosphérique va probablement améliorer la résistance naturelle des vignes (et des autres plantes) aux maladies fongiques, peut-être quelques parasites, mais aussi à la chaleur. En règle générale, les mécanismes de résistance impliquent la production de substances toxiques envers l’organisme envahisseur. Comme d’autres métabolites secondaires, leur production nécessite un surplus de sucres comme substrat. Un ample export de sucres venant du feuillage est aussi nécessaire pour une forte production de cytokinine par les racines, ce qui peut jouer un rôle direct et indirect dans la résistance aux maladies.

Avec assez de nutriments minéraux pour éviter les carences, le surplus de CO2 devrait améliorer ces deux processus. En termes plus simples, les changements des meilleures localisations de chaque cépage dans le futur dépendront de deux facteurs. Premièrement, l’importance relative des changements climatiques résultant des fluctuations naturelles de température ou de l’effet de serre. Deuxièmement, dans quelle mesure l’effet de serre résulte de l’élévation du CO2 atmosphérique et dans quelle mesure il provient des autres gaz à effet de serre. Si les températures globales s’élèvent de 2 à 4°C d’ici 2050, et si seulement la moitié de cette augmentation est due au CO2, la tendance à la hausse des températures optimales peut être plus faible que la hausse effective de température. Il en résulterait un  mouvement vers des régions plus froides ou le besoin de planter des cépages à maturation plus tardive. Un scénario intermédiaire décrit que le CO2 augmentera comme prévu, mais que l’élévation de température sera un peu plus faible, sans doute dû à la disparition des chlorofluorocarbones et à la découverte que les gaz à effet de serre seront moins influents que le modèle GIEC (IPCC) ne le suggère.

L’augmentation des températures optimales pourrait ainsi correspondre à l’élévation effective de température, ne créant ainsi aucun changement de localisation géographique pour un ou des cépages donnés. Le résultat pourrait être une potentielle augmentation du rendement et de la qualité, avec peut-être des changements mineurs dans les localisations optimales pour les cépages particulièrement sensibles tels que le pinot noir.

Le troisième scénario est, selon le Dr. Gladstones, le plus vraisemblable : spécifiquement, la hausse de température due à l’élévation du CO2 sera bien plus faible que le modèle GIEC (IPCC), entre 1°C et 1.5°C. Tout changement de localisation optimale se fera probablement vers des climats plus chauds. En 1997, le Dr Gladstones avait précisément prévu une baisse des températures jusqu’a 2008, je cite « Cela [Mouvements vers les régions plus chaudes] sera provisoire si le modèle naturel des fluctuations moyennes de température apporte, comme attendu, un déclin au cours de la prochaine décennie, ce qui pourrait occulter l’effet de serre sur plusieurs décennies dans le prochain millénaire ».

Arrêtons-nous un moment sur cela : la plupart des prophètes du déclin climatique semblent s’accorder sur le fait que l’hémisphère sud, dont le rapport océan/terre est bien plus élevé, se réchauffera moins que l’hémisphère nord. Un rapide coup d’oeil sur une carte d’Australie vous montrera à quel point les principales régions viticoles sont agglutinées sur la cote sud. La prochaine terre en partant du sud de l’Australie (que ce soit de l‘est ou de l’ouest) est l’Antarctique, qui ne manque pas de terre gelée et glacée. Cependant il y a une ombre au tableau. L’Australie est un continent aride, enclin à des sécheresses périodiques durant entre 5 et 10 ans. Il y en a eu 8 depuis 1895,

et le pays est actuellement sous l’emprise d’une sècheresse dure et prolongée. Les sécheresses s’autoalimentent, créant des sols dépouillés et secs qui répondent de manière exagérée aux gels intenses lors des nuits froides de printemps ainsi qu’aux chaleurs extrêmes et vents de l’été. Avant que le changement climatique  ne soit reconnu, les climatologues et les scientifiques de toutes convictions se satisfaisaient d’attribuer les cycles de sécheresses et de pluie aux changements des courants océaniques El Niño, le pourvoyeur de sécheresse, et La Niña. Malheureusement, dans l’esprit des politiciens Australiens, des medias et du public, les termes sécheresse et changement de climat sont maintenant interchangeables.

Ainsi la quasi-disparition du système de rivières du bassin Murray Darling (le plus grand en Australie) est communément attribuée au changement climatique. En fait, elle est dûe à une combinaison de sécheresse et d’exploitation excessive de son eau depuis 50 ans. Les droits d’utilisation de l’eau (appelés allocations) étaient attribués à tous ceux qui le demandaient. Le coût annuel en était négligeable, ramenant la valeur de l’eau à une valeur faible ou nulle, ce qui ne couvrait que les frais d’entretien de l’infrastructure d’approvisionnement. Les vignobles  irrigués le long de ce système de rivières produisaient plus de 60% de la production annuelle, avec des rendements de chardonnay jusqu’à 400 hectolitres par hectare, plus pour des cépages de moindre qualité. Ce chardonnay fut une des bases qui a permis à l’Australie d’augmenter ses exportations de 10.8 millions de litres en 1985-86 à 722 millions de litres en 2005-2006.

Pour savoir si et quand la circulation d’eau dans le système va se rétablir, nous devrons avoir une meilleure compréhension de la contribution relative de la sécheresse et du changement climatique – changement mesuré pas forcément avec la température, mais aussi avec la distribution continuellement changeante des précipitations. Quelle que soit la cause, plus d’eau sera allouée à Melbourne et Adélaïde (les 4 villes sur la cote est et sud-est ont eu de sévères restrictions d‘eau durant les 5 dernières années, Sydney et Brisbane dépendant d’autres sources). Ensuite, plus d’eau restera dans le système pour des raisons environnementales à cause d’immenses dégâts infligés à : des eucalyptus de rivière plusieurs fois centenaires, au Lac Alexandrina ainsi qu’aux Lacs du Coorong le long de la cote est d’Adélaïde. Ces derniers étant irréparablement endommagés par le remplacement de l’eau douce par de l’eau salée directement pompée de la mer dans un effort désespéré de les sauver d’une destruction totale.

Quelle que soit la disponibilité de l’eau pour toutes les formes d’agriculture, elle sera plus chère et son utilisation étroitement surveillée. Pour la viticulture, la micro irrigation souterraine remplacera l’irrigation de surface (goutte à goutte ou aspersion), et son utilisation par hectare sera réduite. Les 260 hectares du vignoble Oxford Landing de Yalumba se sont déjà lancés dans un essai de 3 ans avec utilisation de seulement 5% de l’eau utilisée auparavant, afin de vérifier si les vignes peuvent survivre et, si oui, quel en sera le rendement. Les limitations du Riverland (comme sont appelées les régions qui dépendent du Murray Darling) sont généralement : des sols sableux à structure très légère, une salinité grandissante, et seulement 150 mm de précipitations durant la période de croissance de 7 mois. Donc des coûts de production plus élevés devront être absorbés par des rendements plus bas. Il reste à voir si l’offre et la demande limiteront la future production.

Il est certain qu’elle va être sensiblement plus faible. Constellation Wines Australia (propriétaire du groupe Hardy) a annoncé des exportations vers le Royaume-Uni en baisse de 1 million de bouteilles cette année, citant comme raison une marge inadéquate. D’un autre coté, Constellation a déclaré son intention de se concentrer sur des vins d’appellation de meilleure qualité et à prix plus élevés. La croissance des exportations en 20 ans en volume (et en valeur) a déjà commencé à s’inverser, et ce en dépit d’une récolte abondante et inattendue en 2008. Le déclin prononcé de la valeur du dollar Australien (qui cependant

fluctue toujours beaucoup) aidera les exportations; il est attendu qu’il se stabilise entre 65 et 76 cents par rapport au dollar américain. Mais le mouvement progressif de la quantité vers la qualité se prolongera durant au moins la prochaine décennie. Si les faibles précipitions persistent, les plantations augmenteront dans les régions proches des extrémités sud de l’Australie. La viticulture biologique, déjà en hausse, deviendra plus répandue. La couverture des sols (appelée aussi mulch ou paillage), surtout le long des rangs de vignes, augmentera. Et si les prévisions du Dr. Gladstones sont correctes, l’élévation des niveaux de CO2 devrait aider à augmenter (plutôt que diminuer) les rendements de vendanges de meilleure qualité sans aucune augmentation des précipitations.